Le week-end était tant espéré, et il est arrivé. Après cette semaine harassante où j'ai travaillé jours et nuits pour faire passer de nouveaux process, je suis en zombie le samedi même si je m'habille street trendy chic.
Je me ballade en ville et je croise de nombreux regards sudistes. Beaucoup de gens beaux finalement et élégants. Mon nouveau district est clairement différent de celui de mon enfance et adolescence. Moins de laideur et de misère. Ces deux choses marchent malheureusement souvent ensemble. Alors je regarde les gens comme on fait les boutiques quand on sait qu'on ne va pas acheter.
Mon père me manque. J'aurais voulu pouvoir partager ma nouvelle vie avec lui. J'ai beau vouloir voir les choses de façon plus positive, le manque reste là et c'est bien difficile de le décrire à ceux qui n'ont jamais perdu quelqu'un de cher.
Je me fais une nouvelle petite vie de quartier. Je ne connaissais pas ce Marseille bourgeois branché rock'n tracho Roll. Pas mal de grands trentenaires et jeunes quarantenaires. Je leur reconnais bien volontiers un 1er prix de style et de coolitude intello branchée bon look mais je n'ai pas envie d'en faire partie. Je les regarde beaucoup mais ne ressens rien à leur contact.
Je préfère les êtres rugueux et les discussions légères avec les autres marseillais, ceux que je connais mieux et que je préfère. Ils n'ont pas autant de style mais ils sont plus chers à mon cœur, je reconnais être dans ma ville quand ils sont aux alentours.
Quand j'étais ado, j'étais déjà curieuse de découvrir les gens. Dans mes descentes en ville, je croisais parfois ces jeunes du centre, plus friqués et stylés que ceux que je fréquentais d'ordinaire. Je discutais, je dansais et je séduisais même mais j'étais très sauvage et j'avais des complexes. De style, de moyens, et de culture. Je n'ai jamais embrassé un garçon dans ces night-clubs d'après-midi.
Mon milieu est pragmatique, modeste et simple. Plein d'un amour fait de cuisine et de choses basiques, saines.
Finalement, bien vite, je me suis rendue compte de la relativité des attraits de l'argent et aussi que le style ne m'attirais que lorsqu'il était une attitude naturelle, pas une posture bien travaillée et bien habillée.
Ici comme à Paris, je vis mon perpétuel paradoxe: je ne veux pas faire partie de ce milieu bobo mais il faut toujours que j'aille vivre dans ses quartiers et que j'en pique parfois le costard.
Bastarda.